Gamine

La vie est une chose trop importante pour la confier à des adultes

Mercredi 30 septembre 2009 à 17:55

Photo d'un de mes dessins.http://th03.deviantart.net/fs51/300W/i/2009/273/0/e/Pour_Flora__Inspiration_Daphne_by_LeSuicideDeLaMouche.jpg
Destiné à l'une de mes meilleures amies, Flora.
Je le lui donnerai quand je la verrai. En Espagne, en France, on verra.
Une des rares choses que je fait, en ce moment.
Dessiner.

Dessiner de l'irréel, de la magie, dessiner tout sauf le monde dans lequel je vis. Dessiner des arc-en-ciel, des femmes ailées. Laisser courir le crayon, surligner au stylo, et peindre, me fondre avec l'aquarelle jusqu'à oublier que le vrai monde est sous mes bottes.

Deux " crises " aujourd'hui.
Oh, la première n'en était pas une. Je me suis faite de la purée de brocolis mélangée à du riz complet. Quand Sam me voit avaler cette mixture, il me regarde comme si je me délectais d'une quelconque pâtée pour chats. Puis j'ai pris un yaourt allégé en tout, parfum mûre. Mais je ne sais pas. Je dois trop croiser le miroir. J'avais envie d'autre chose. De sucre, de graisse, de goût. Alors j'ai mangé du Beaufort, que mon père m'a ramené de Savoie. Des chips. Des gâteaux, des biscottes, de la glace saveur tiramisu. Et j'ai vomi. Même en buvant du coca light et grillant une cigarette, j'ai toujours l'impression d'empester le vomi. Même si cela me soulage. De vomir. Vomir tout le reste, je pense, vomir les peurs, vomir le monde, vomir ma vie.

Tenté, ensuite, de me concentrer sur mes cours.
Hier, Sam m'a fait réviser. Mais dans des conditions spéciales : je devais le regarder dans les yeux, ne pas me tordre les mains, ne pas balancer de la jambe. J'ai été incapable de répondre, ou presque. D'abord le regard dans les yeux qui, même le sien, me donne envie de m'évanouir dans l'air, les mains qui ne devaient pas se torturer, la jambe fixe... rien pour me rassurer. J'ai oublié le peu que je savais.
J'en ai rêvé cette nuit.
Une femme, une employée, me posait des questions. Je ne savais pas répondre, elle se moquait en disant qu'après mon stage, on ne me reprendrait jamais ici.

Bref.
J'ai continué mes cours, la peur aux tripes.
Puis j'ai arrêté, fumé les 6 cigarettes qu'il m'avait laissées, ignorant qu'un paquet " de secours " est caché dans une de mes piles de vêtements. Je n'avais pas faim, donc là, c'était une crise. Pas faim, mais instinctivement, je suis entrée dans la cuisine, ouvert les biscottes bon marché pour en avaler quelques unes, piochant en même temps dans une boite de bananes séchées. Il m'en fallait plus. Alors j'ai terminé le pot de glace, terminé les chips. Et des gâteaux trop secs, à droite, à gauche. Et j'ai encore vomi. J'ai vu un visage cadavérique dans le miroir. Dont le maquillage coulait jusqu'au menton. Après avoir ôté ce mensonge superficiel et aspergé ce visage d'eau, j'ai ré-analysé. J'avais encore plus l'air d'une morte-vivante. Ma peau n'est pas pâle, elle est... je ne sais pas, terne, translucide.

Je tente de me concentrer sur mes cours, mais... je ne sais pas.
J'ai ouvert mon paquet de clopes secret, fumé. Fumé en lisant un bouquin que j'ai acheté. "Moi et les autres, comment développer son intelligence sociale ". A défaut de psy, je lis.
Et, aussi, envoyé un texto à Sam, parce que c'est plus pratique que de devoir lui avouer ce soir, quand il rentrera crevé, et énervé. Il m'a appelée.

" Je suppose qu'il n'y a plus de glace ?
- Non.
- Plus de chips ?
- Non plus... "


J'ai honte.
Nous faisons désormais nos courses dans des magasins hard-discount histoire de garder mon studio, et moi je dévore tout.
Mon père evnoie des chèques à Sam pour " ma pension " . Je suis ce que l'on appelle " une personne à charge ".

J'ai aussi entendu parler d'une mesure prise par Monsieur le Président pour " aider les jeunes " qui peinent à trouver un emploi. Mais en fait, seuls les jeunes ayant déjà travaillé deux ans auront cette aide. Je ne pense pas forcément à moi quand je dis ça, mais combien de jeunes sortent des études, diplômes en poche, et ne trouvent rien ? Qui les aide, eux ? Sûrement pas l'Etat. Mon monde me donne la gerbe. Qu'on ne s'étonne pas que je dégueule tout ce que j'avale...


Dimanche 27 septembre 2009 à 17:16

Ils sont repartis vers dix heures et demi, ce matin.http://th08.deviantart.net/fs23/300W/i/2009/254/7/7/Follow_the_Yellow______by_photofrk77.jpg
Mon père, mon oncle, mon frère. 
Je ne cache pas avoir voulu me glisser dans le coffre de leur voiture.

***

Vendredi, je me sentais triste. Nostalgique à l'avance de savoir qu'ils devraient repartir.
Me laisser "seule".
      "Seule..."
              "Seule..."

J'aurais préféré attendre encore une semaine.
Ou deux.
Ou trois.
Attendre, avoir un but, y penser, imaginer.

Je ne sais plus vers quelle heure ils sont arrivés. Seize heures trente, me semble -t- il. Afin d'être plus efficace que leur GPS, je suis sortie sur le petit balcon, mon portable à la main. Observant l'horizon. L'horizon de béton.

Lorsqu'enfin ils se garèrent, j'ai dévalé les escaliers, un peu comme Sam lorsqu'il entend des gens à l'extérieur réciter sa plaque d'immatriculation.
Papa m'a sauté dans les bras. Je me sentais... gênée, je ne sais pas. Les câlins.... je n'ai pas le mode d'emploi. Petit frère, dans son blouson officiel de la tournée de Mylène Farmer, et tonton, souriant.
Ils ont visité notre studio, qu'ils ont apprécié, rencontré Nebel, qui était loin d'être contre ces caresses supplémentaires.
Ce soir-là, nous sommes allés mangé dans la friterie d'un des amis de Sam. Ils ne sont pas parvenus à terminer leur assiette. Etrangement, j'ai commandé un "panini savoyard", moi, ce soir-là.

Rémi (petit frère) rêvait d'aller à Bergues, où ils ont tourné ce film inutile, là, avec Dany Boom, et au passage, je ne supporte Dany Boom, tout du moins, s'il était muait, ça passerait mieux.
Nous avons fait deux heures de route pour exaucer son voeux. Surexcitée d'être avec ma famille, je sautais dans tous les sens, pour de vrai. Une gamine de douze ans avait alors plus de maturité que moi. J'ai fais quelques films, où je joue la journaliste, où je harcèle "Monsieur Rémi". Quand j'aurai le moral, j'en ferai peut-être un montage.
Puis, histoire de, nous sommes allés voir la mer du Nord.

Petit passage au Quesnoy, dans les ramparts. 
Je continue de gambader, poser des questions.

Puis repas chez les parents de Sam.
Tous appréhendent sauf moi. Je savais que cela arriverait, et me suis toujours dis "bah s'ils s'entendent tant mieux, et s'ils ne s'entendent pas, tant pis".
Après la visite du propriétaire, avec poules, canards et chevaux, nous avons grignoté. Visiblement, ils s'entendent bien. Tout du moins, ils ont passé la soirée à parler de leurs régions, leurs différences, leurs particularités. La Savoie, le Nord, le Nord, la Savoie. Mon choix est fait. Tout comme mon frère, j'ai ce qu'il appelle " le mal du plat".
Vivement que je retrouve mes sommets enneigés, mes falaises et mes forêts de connifères... y'a trop d'oxygène ici. D'ailleurs, même si ça coûte cher, j'ai décidé d'aller à l'aiguille du midi avant de mourir, voire mieux, l'été prochain, avec Sam. N'ayant pas l'alpinisme dans le sang ( ça ne doit pas être génétique ), je vais devoir payer... en comptant Sam... 160 euros pour prendre le téléphérique. (la boite à touristes obèses qui savent pas skier et escalader, j'ai honte). Ma mère y est allée, oui, mais en grimpant. Mon père aussi. Ils m'ont parlé du manque d'oxygène là-haut. Et je veux connaître ça. Papa disait qu'avec ses amis, ils faisaient la course dans les escaliers qui montent au restaurant (avec vue sur les grands sommets), en se disant le dernier arrivé paye. Sauf qu'ils n'arrivaient pas à courir et se fatiguaient très vite. Je veux connaître ça. Si, si, qu'importe la stupidité de ma démarche. Histoire d'imaginer les sherpas qui grimpent l'Everest tous les ans pour en faire une via ferrata pour touristes...
Bref.

Au cours du repas, je commence à me sentir mal. Sam et moi sortons fumer une première cigarette, trois quarts d'heure plus tard, je la traîne presque dehors d'un regard. J'attrape une cigarette, l'allume dans le noir et fonds en larmes.

" Je ne veux pas qu'ils partent... enfin, tu sais, à chaque fois que je les vois, je me dis, c'est... c'est peut-être la dernière fois. On ne sait pas ce que la vie nous révèle. J'ai passé des années à refuser de les voir, quelle conne j'étais. Aujourd'hui, ils me manquent tant... "

Le mégot est par terre depuis un quart d'heure que les larmes refusent de cesser de couler.
Je demande à Sam d'appeler mon père.

Nous parlons, ses paroles sèchent mes larmes.

***

Du fait des 8 heures du route, ils sont partis tôt.
J'ai souris.
Un peu pour de faux.

Depuis, je n'ai rien fait. Je me suis endormie devant l'un des Destination Finale que j'avais, de toute façon, déjà vu une dizaine de fois. J'ai osé avaler des gâteaux "prince", parce que je sais pas, fallait que je comble... un vide ?
Oui.

Lisa m'a enfin appelée.
Elle replonge dans l'anorexie, elle ne risque pas de quitter l'hôpital.



Quand j'ai raccroché, j'ai pensé jeter les gâteaux dans la poubelle et oublier, moi aussi, de manger.
Comme avant.
Mais ça serait stupide.



Vendredi 25 septembre 2009 à 14:57

Mon papa, un de mes tonton, mon petit frère, vont arriver d'ici quelques heures.http://th08.deviantart.net/fs50/300W/i/2009/267/c/4/Sad_Rose_by_Yollanda.jpg
Ils repartiront dimanche en fin de matinée, ou en début d'après-midi.

Cela fait des mois que j'attends leur venue.
Depuis que l'idée a germé dans la tête de mon oncle.
Des mois que j'espère, des mois que j'attends.
Que j'y pense, que je prépare, que je range et organise.

Mais...
Je ne sais pas...

Maintenant qu'ils viennent, j'ai le blues.
Comme si, dès leur départ, j'allais me retrouver sans plus rien à attendre. Comme si... je ne sais pas, en fait. Je sais que ces quelques heures avec eux vont passer vite, que je les aurai à peine aperçus qu'ils seront partis, et que cette affreuse routine reviendra me donner des ordres, me dire quel chemin prendre afin de tourner en rond, encore, et encore.

            Et encore....

Ce matin, j'ai tout nettoyé de fond en comble, arrangé la décoration, passé aspirateur et serpillère, râclé les recoins avec une éponge, astiqué de haut en bas, et même en diagonale.
Puis j'ai cherché comment m'habiller.
Durant deux heures, j'ai essayé mes vêtements, superposé les couches, mélangé les matières, mais rien. J'avais tout juste envie de pleurer après chaque constatation du miroir.
Alors je ressemble à... bah à rien.
Après tout, ils ne viennent pas pour un défilé de mode, mais j'aurais aimé me faire élégante.
Que papa oublie qu'il m'a toujours surnommée "corbeau".
Qu'ils se disent que je change, alors qu'en réalité, je ne change pas vraiment.
Je ne sais pas.
Syndrome papier cadeau, je suppose.

Sam a terminé tôt toute la semaine. A tous les coups, pile aujourd'hui, il va finir tard.
Hier, il est rentré vers 11H20. J'étais en train de dessiner en écoutant parler le Docteur Quinn.
J'aimerais qu'il soit rentré pour leur arrivée.
Parce que je stresse.
Je stresse alors que ce n'est qu'une partie de ma famille qui vient me voir. Si encore j'attendais... je ne sais pas... Mylène par exemple. (Farmer). Là, oui, j'aurais des raisons de stresser. Ou si on venait m'interviewer pour je ne sais quel article stupide pour je ne sais quel journal inutile. 
Mais non.
Je stresse parce que je vais voir mon père, mon oncle, et mon frère.
Faut le faire, vraiment.


Je suis brièvement sortie.
Racheter des cigarettes en me disant que comme la vierge, j'attendrai le saint esprit pour arrêter. Mais en tant qu'athée, ça va être difficile. Je ne sais pas. J'arrêterai, ne me demandez pas quand.
Passage à la pharmacie.
Des suites de mes migraines permanentes.
La jeune qui s'est occupée de moi faisait des bulles de chewing-um, j'ai trouvé ça extrêmement poli. Pour changer, je n'ai pas su m'exprimer. Les mots dans ma tête étaient bien écrits, mais ils sortaient dans tous les sens. "Mille" est devenu "Mitte". Demander une boite de doliprane Mitte, c'est idiot. Je me reprenais, honteuse, et elle, qui continuait de faire des bulles comme une vulgaire adolescence grotesque. Je prépare toujours à l'avance ce que je vais dire, afin de déblatérer une phrase française, correcte, polie, sans familiarité, et claire. Mais la phrase ne sort jamais comme elle était prévue dans ma tête. Elle se décortique et les mots se mélangent, ce qui donne un résultat sans le moindre sens. Mais bon, pour une fois, je suis parvenue à payer sans que l'on m'aide, j'avais encore une faible notion du "comment compter ses euros en pièces"...

Enfin bon.

Sinon...
Oh, je ne sais pas, je me sens blasée.
Lisa est en clinique.
Du fait de ses hallucination visuelles et auditives, ses idées noires.
Visiblement, elle n'a pas droit au portable.
Elle m'a appelée juste avant d'arriver dans l'établissement.

"Ne t'inquiète pas, ils vont sûrement me le prendre, le portable, comme d'habitude".

Armée d'un grand courage, j'ai appelé ses parents.
Aucune réponse.
J'ai laissé un message.
Ils ne m'ont pas rappelée.
La dernière fois que la situation était similaire, à force d'appeler, son père m'a avoué entre deux soupirs qu'elle avait fait une grosse TS, que cela faisait 6 jours qu'elle était dans le coma, et que les médecins préféraient ne pas se prononcer.
Mais je vais rester optimiste.
Il le faut.
Même si de toutes mes amies "rencontrées dans le brouillard", Lisa est celle qui n'est jamais sortie totalement indemne de ses tentatives., et qui plus est fait toujours en sorte que rien ne vienne perturber son décès Entre son cou dont on voit encore la cicatrice, lorsqu'elle a voulu se trancher la carotide, le creux du bras aux épaisses cicatrices lorsqu'elle s'est coupé une veine à défaut d'avoir le temps d'en couper plus... je sais qu'en ce qui la concerne, ses tentatives ne sont pas des appels au secours. La dernière fois qu'elle a failli y passer, elle a soigneusement rangé les plaquettes vides dans les boites afin que rien ne semble suspect, pour passer deux mois en soins intensifs après sa semaine de coma.
Et Lisa, comme toutes mes amies, je refuse de la perdre.

Daphné a lancé une bouteille à la mer, hier.
Ses parents sont allés la chercher.
Elle s'est re-faite hospitaliser aujourd'hui.
J'aimerais tant qu'elle s'en sorte.
Elle le mérite tant.
Je suis heureuse de ce qu'elle a fait. Je ne pouvais plus voir, par le biais de son blog malsain, des photos de ses bosses au visage des suites de se l'être cogné contre le mur, ses entailles dans la main, ou son bras couvert de sang dont on ne voyait plus la chair. 

***

Autrement, Sam a eu la joyeuse idée de me faire regarder "Old Boy" hier.
Je n'ai pas pu regarder jusqu'à la fin, je suis partie sur le balcon prendre l'air frais, en larmes, avec l'impression que j'allais vomir.
Le talent d'un réalisateur n'excuse rien.
Ce n'est pas une raison pour faire un film pareil.
Certaines choses ne se montrent pas, ne doivent pas même être dites.
La violence physique, je supporte jusqu'à un certain stade, mais la violence psychologique, je ne peux pas.
Je me suis sentie obligée de m'inscrire sur Allocine pour écrire un commentaire sur ce film que l'on devrait interdire aux personnes dôtées d'une âme.

***

Je vais aller m'allonger en attendant leur arrivée.
Si je me change, je sais que ça va durer des heures.
Et j'ai encore la migraine.

***

Je ne sais même plus si j'ai envie qu'ils viennent.

J'ai juste envie de m'effacer du tableau.





Jeudi 24 septembre 2009 à 7:38

Je savais que je n'avais que peu de chances de m'endormir, hier.http://gamine.cowblog.fr/images/832498567.jpg

Alors j'ai avalé une mépro, étant donné que non seulement cela me permet d'éviter mes dizaines de réveils nocturnes, mais qu'en plus, cela me fait oublier mes cauchemars au réveil. Ce qui n'est pas négligeable...

Hier soir...
Je tente d'obtenir des nouvelles de Daphné par SMS, étant donné que la veille, elle avait avalé dix somnifères, à défaut de ne pouvoir en avaler plus. J'attends une hypothétique réponse de sa part, qui ne tarda pas arriver sous forme de bip sonore.

"Mal. Me suis fracassé tête contre mur cause boulimie. Coupée. Voir blog."

Réponse très impersonnelle.
Je vais donc constater l'étendue des dégâts sur la toile.

Des phrases. Une photo de sa main striée au dessus du lavabo noyé d'un sang foncé. Une bosse rougeâtre sur le haut de son front, juste en dessous de ses fins cheveux blonds comme les blés.

Que puis-je faire, moi, si loin d'elle ?
Je donne mon portable à Sam.

"Je ne sais pas quoi lui dire, tu sais tellement bien trouver les mots, toi".

Il l'appell
e. Elle répond. Sa voix, son ton est blasé. Elle fait semblant de rire. Elle souhaite probablement que nous la laissions tranquille.
A défaut, je lui ferai un dessin, des bricoles, une lettre.
Au cas où cela puisse lui arracher une demie lune sur les lèvres...


                      ***
Je ne sais trop comment je me sens, ce matin.
J'ai décidé de me lever à la même heure que lui, 05H30.
Parce que j'avais besoin de fumer, donc d'attendre qu'il s'en aille.
Pendant qu'il se douche, j'attrape deux cigarettes de son paquet pour les cacher derrière mes livres.
Il m'en laisse six pour la journée.

J'en ai déjà fumé deux.

Si seulement je n'avais pas commencé.

             ***http://gamine.cowblog.fr/images/roux.jpg
Il fait encore nuit.
Hier soir, avant de ne m'endormir, j'avais des flash-back de mes "années clinique".
Les longs couloirs, aux portes d'un vieux turquoise. Petits chambres pour âmes en détresse.
Je me souviens de l'infirmerie, au centre des trois couloirs de mon étage, sorte d'aquarium en verre où nous pouvions regarder le personnel soignant évoluer, tels des poissons exotiques dont nous ne comprenions pas grand chose au comportement. Seul moyen d'entrer dans le bocal : frapper. La carte magique, nous ne l'avions pas.

Lorsque je parvins à m'intégrer parmi les patients, les autres jeunes filles et moi cherchèrent des moyens d'occupation.

Lors de nos passages à l'infirmerie, nous devions tenter de voler quelque chose. Et dieu sait que nous y allions sans le vouloir, dans cet aquarium aseptisé.

Je me souviens d'avoir ragé après un patient qui m'avait dénoncée. Je m'étais mutilée, lorsqu'il a vu la manche de mon pull parsemée de tâches de sang, il n'a pas écouté mon regard noir. Il a averti les infirmières, qui m'ont traînée dans leur bocal me soigner.
L'une était assise devant un ordinateur, l'autre est partie à la recherche d'un set de suture.
J'ai fait semblant de dormir sur ma chaise, pour attraper ce que je trouvais autour de moi. Des seringues sans aiguille, des bandages, oh, nous ne rapportions jamais rien d'exceptionnel.

Mon psychiatre m'avait demandé de ne pas " traîner avec l'autre Marion" qui était une très mauvaise influence. Cependant, j'étais persuadée qu'il y avait quelqu'un de bien derrière cette enveloppe corporelle mutilée, parfois fracturée, sous-alimentée ou sous sonde. Un dimanche, alors que les trois quarts des patients étaient en permission, que le personnel soignant était peu nombreux et, surtout, guère motivé, nous étions sorties en cachette en escaladant les barrières dans un coin dénué de caméras. Rapidement, nous  décidâmes
d'infiltrer la piscine fermée, juste à côté. De nouvelles barrières à escalader, et nous sautions à pieds joints dans l'eau, toutes habillées, sous un soleil de plomb. Personne ne nous a engueulées lorsque nous sommes rentrées, tout bêtement parce que personne ne nous avait vues. Ce qui a légèrement attristé nos esprits maladifs.

IL y avait les nuits blanches, aussi. Qui étaient plus agréables lorsque les infirmières de nuit étaient Nadia et Sylvianne. Nadia était gothique, un peu folle, gentille. Des heures à parler avec elle valaient tout l'or du monde. Sylvianne était une maman pour nous toutes. Lorsqu'elle décéda, j'étais déjà sortie de la clinique. Son décès fit rechuter nombre de jeunes patientes. J'avoue qu'en l'apprenant, je ne me sentais pas très bien. Mais je préfère repenser à son sourire, l'étincelle des yeux, sa douce voix, que de pleurer.

La clinique, c'était un autre monde. Un monde sans factures, sans société, sans impôts, sans responsabilité. Un cocon. 

                 ***
Demain, papa, petit frère et un de mes oncles viennent.
Ils arriveront en fin d'après midi.
J'ai hâte.
Et en même temps, je me dis que toutes les belles choses ont une fin, alors je tente de calmer mon enthousiasme en me disant que dimanche après midi, lorsqu'ils seront partis, je repenserai à ce moment, ce jeudi où j'écrivais que j'avais hâte.

Vais aller m'allonger en attendant le lever du jour.

J'espère qu'il y aura du soleil, surtout.

 

Mercredi 23 septembre 2009 à 9:54

Hier matin, le moral touchait les nuages. IL volait, traversait les cieux, libre et heureux, en se foutant bien de chercher les raisons d'un tel enthousiasme.
http://th04.deviantart.net/fs51/300W/f/2009/265/6/0/603c29d9b437936f409f9f9ca7ae0a58.jpg
Puis il s'est détérioré.
A mes dépends, sans prévenir, comme une fleur qui se fane.
Je ne parvenais à me concentrer sur mes cours, alors, pour éviter de m'allonger dans le but de dormir, j'ai commencé un dessin d'une fée sur un nénuphars.

Sam est rentré tôt, et m'a proposé une ballade dans une réserve naturelle volontaire. Pour ne pas le vexer, j'ai dis oui. Dans la voiture, j'ai profondément dormi. J'ai tenté de trouver de l'intérêt à suivre un chemin entre les arbres, en baillant, sans conviction.

Il a aperçu mon paquet de cigarettes, le dernier que je pouvais m'offrir. Lui-même en avait racheté un. N'ayant plus d'argent, il m'a laissé six cigarettes pour aujourd'hui. J'avoue lui en avoir volé deux pour les cacher.
Parce que même avec huit clopes, je risque ne pas tenir.
Ce n'est pas le manque physique qui me pose problème, mais le manque psychologique.
J'ai besoin de tenir une cigarette, besoin de sentir l'odeur de la cigarette, besoin d'inspirer, expirer, jouer avec mon vice du bout des doigts.
Il existe des inhalateurs, je sais, mais ils coûtent plus cher qu'une cartouche, avec leurs recharges.

Le pire, c'est que j'adore l'odeur de tabac froid sur mes doigts. Je avoir atteins le stade final de la dépendance psychologique...

Ce n'est pas le cancer qui me fait peur. En réalité, je n'ai pas peur. Le manque dépasse l'envie d'être en bonne santé. Non, le problème, c'est le prix de ce poison. Qui va augmenter de 6% d'ici quelques semaines. Pourquoi ai-je commencé ? Au lycée, je trouvais les autres jeunes qui fumaient ridicules. J'ai quitté l'internat, me suis brouillée avec ma meilleure amie, parce qu'elle et les autres fumaient dans la chambre, quand elles ne buvaient pas comme des trous. Puis je suis arrivée sur Lyon. Et, suite à la nouvelle " vous allez être hospitalisée ", je suis entrée dans un tabac. J'avais peur qu'on pense que c'était la premier fois que j'achetais des cigarettes, alors j'ai pensé que demander des Camel serait moins novice que d'acheter des Malboro, les deux seules marques dont j'avais entendu parler. Au début, j'ai trouvé cela ignoble. Mais il restait 19 cigarettes dans le paquet. Et je déteste gâcher.
J'ai fini le paquet en pensant que ça allait me tuer tant cela était immonde. Puis le manque a ébouillanté mes veines. Alors je suis retournée au tabac...

Quelle conne.
Bref.

Le mardi soir, habituellement, je regarde Desperate Housewifes pour me détendre. Un besoin vital de futilité, de manipulations, d'humour noir, de rires jaune. Mais non, plus envie. J'ai avalé deux mépronizine et me suis endormie comme une enclume. Et, pour une fois, je n'ai fait nul cauchemar teinté d'hémoglobine et de terreur.

***

Climat morose ce matin.
Du gris à perte de vue.
Je déteste ces matinées grises et brumeuses. 
Qui envoient notre moral sous terre, encore plus à l'obscurité.

Je suis toute courbaturée. Peut-être parce que, contrairement à d'habitude, je n'ai pas varié mes exercices de gym hier. Pour ne faire que des ciseaux sans voir défiler le temps.
Mal partout, fatigue. Déjà fumé deux cigarettes. Mal à la gorge, aussi. Comme si j'avais vomi toute la nuit. 

Je ne sais pas trop ce que je vais faire.
Terminer mon dessin ?
Réviser ?
Les deux, probablement.

***

Juste envie de parler pour ne rien dire. Hier, pendant que le repas chauffait, nous nous sommes posés devant la première émission de télévision. Le thème était " ces stars prêtent à tout pour maigrir ". J'avais envie de me jeter par la fenêtre que de voir le monde dans lequel je vis.

Un jour, pour rire, j'avais dis à Sam que je ne serais pas contre le fait d'avoir un ver solitaire.
Aujourd'hui, des femmes avalent réellement des embryons ou oeufs de vers solitaires pour maigrir...
Ils parlaient aussi de la taille 0-0. 
Du régime "limonade et rien d'autre".
Avec des photos de stars et autres dont on se demandait s'il ne leur manquait pas des os.

Le reportage terminé, vint la publicité.
Pour des céréales dites de régime, mais qui contiennent en fait plus de sucre que celles au chocolat pour les enfants, avec des femmes idiotes qui en vantent les mérites, comme si leur corps était l'unique priorité de leur vie.

J'ai éteint la télé.
C'est vrai, si dans les vitrines des magasins, il y avait des modèles "normaux", les femmes auraient moins de culpabilité à acheter. Essayer un vêtement que l'on a vu sur un mannequin en plastique qui fait du 32, analyser l'effet sur nous, et l'envie s'envole pour que l'on finisse pas aller s'acheter une corde.
Ce monde est stupide.

Argent, maigreur, sexe. 

Vais aller vivre avec les papous, les dernières tribus de je ne sais où.
Une vie sans stress, dans la nature, où l'on ne comprend pas quelle importante peut avoir un triste billet vert, où les rondeurs sont attirantes, où le sexe n'est que perpétuation de l'espèce.



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